C’est de lui que provient la plus grande partie des émissions de Gaz à Effets de Serre (GES), le monde du vivant en produit, en capte, en stocke, il s’agit du carbone. A travers cet article je reviens sur le cycle du carbone, sa production, mais également les moyens de le capter pour compenser nos émissions.
Qu’est-ce que le Carbone ?
Le Carbone est un composé chimique présent naturellement sur Terre, il n’a pas été créé par l’Homme. On en retrouve principalement dans la biomasse, qu’elle soit terrestre ou océanique, on parle de carbone biogénique.
Lors de la dégradation des espèces vivantes, le sol récupère une partie du carbone qu’elles contenaient, c’est le carbone fossile. De ce carbone provient notamment le pétrole que l’Homme puise au moyen de forages.
Les flux naturels du Carbone
Les espèces vivantes captent ou rejettent du carbone en fonction de leur nature. Les humains par exemple prennent de l’oxygène dans l’air ambiant, et expulsent entre autres du CO2 contenant du carbone : c’est la respiration. Le procédé est commun à bon nombre d’espèces animales.
A l’inverse les végétaux pratiquent la photosynthèse pour leur croissance. Ce principe consiste à convertir l’énergie provenant du soleil en glucides nécessaires à leur développement. Ce faisant, les végétaux captent du CO2 et rejettent de l’oxygène.
Le principe chimique est le suivant
Le gaz carbonique (CO2), et l’eau (H2O) sont convertis en glucides et en oxygène (O2). Les végétaux sont donc des espèces capables d’utiliser du carbone et de le décomposer en oxygène notamment.
Les flux anthropiques (liés à l’Homme)
En plus d’émettre naturellement du CO2 lors de sa respiration, l’Homme provoque un relâchement de carbone dans l’atmosphère via la combustion de différentes matières. Les activités génératrices de ces émissions de carbone peuvent être divisées en deux catégories : nos actions sur l’usage des sols et la combustion de matière.
Le changement d’usage des sols, c’est par exemple la déforestation. En abattant la végétation présente dans une surface donnée, on libère tout le carbone qu’elle contenait.
Le même phénomène se produit lorsque l’on convertit une parcelle présentant une variété d’espèce pour la transformer en une terre agricole (une seule espèce plantée).
Pour ce qui est de la combustion de matière fossile la donnée est encore plus claire, l’humain puise dans le sol une matière telle que le pétrole riche en carbone. Lors de la combustion pour créer de l’énergie, le carbone qui était présent dans cette matière est relâché dans l’atmosphère.
Bilan de ces flux
Si l’on prend les flux naturels et les flux anthropiques, regardons sur une année les ordres de grandeur des quantités émises et des quantités absorbées (ou séquestrées).
Sur la partie de gauche on retrouve les flux naturels avec en flèches vertes et rouges les phénomènes de photosynthèse et de respiration décrits plus haut. Il y a par ailleurs un transfert de 0,8 GtC (Gigatonne de Carbone) entre la biosphère et les océans de par les courants des fleuves et rivières.
Par ailleurs 0,04 GtC de carbone provenant des sols est directement envoyé dans l’atmosphère via l’activité volcanique. Le bilan de ces échanges c’est 150 GtC émises et 155 GtC séquestrées, donc un résultat de 5 GtC séquestrées par an.
Pour les humains la donne est différente car ils n’ont aucun mécanisme séquestrant le carbone. On est donc sur une émission nette de 9 GtC par an, dont 1,2 GtC provenant de la déforestation et du changement d’usage des sols, 7,8 GtC provenant de la combustion de ressources fossiles.
Si on cumule cette valeur de 9 GtC rejetées avec celle des 5 GtC séquestrées par le vivant, le résultat net global est une émission d’environ 4 GtC par an. Soit 4 milliards de tonnes de carbone émises par an dans l’atmosphère.
L’influence des humains sur la concentration de gaz carbonique dans l’atmosphère est ici sans équivoque. Ce carbone excédentaire dans l’atmosphère favorise le phénomène d’effet de serre et le réchauffement global.
Les puits de carbone
Le carbone est contenu dans différents milieux sur Terre qui permettent de le stocker. Ces ‘réservoirs’ à carbone sont appelés les ‘puits de carbone’, ils sont les mêmes que ceux évoqués précédemment à savoir les océans, les forêts ou autres concentration végétale (toundra, tourbière, etc.) et les sols.
Les océans
Contrairement à une idée reçue selon laquelle les forêts sont la principale source de production d’oxygène et de captation du CO2, il s’agit en réalité des océans.
Le plancton végétal, ou phytoplancton, produit à lui seul la moitié de l’oxygène que nous consommons, et absorbe environ 30% du CO2 que les humains émettent.
Son rôle est donc tout à fait crucial dans la régulation de l’effet de serre. Ce phytoplancton, premier maillon de la chaine alimentaire océanique, capte le CO2 atmosphérique qui s’est dissout dans l’eau. Par le phénomène de la photosynthèse décrit précédemment il stocke ce CO2 et rejette de l’oxygène.
Ce phytoplancton est consommé par des espèces animales, qui absorbent du même coup le CO2. Ces organismes vivants, à leur mort, viennent sédimenter au fond de l’océan. Le CO2 est alors lentement séquestré dans le sol.
Une grande partie du CO2 est tout de même rejeté dans l’atmosphère à la mort du phytoplancton, mais la balance est positive comme expliqué au chapitre précédent.
Le schéma suivant montre le principe que je viens de décrire appelé ‘pompe à carbone biologique’.
Les forêts, tourbières, toundras
Autre milieu dans lequel on retrouve une forte concentration végétale, les sols continentaux tels que les forêts, les toundras ou les tourbières, constituent le second puit de carbone le plus essentiel.
De la même façon que le phytoplancton, les espèces végétales de ces milieux pratiquent la photosynthèse et conservent plus de carbone qu’ils n’en rejettent.
La capacité d’absorption du CO2 dépend de l’espèce végétale mais aussi des conditions dans lesquelles elle évolue : température, humidité, nutriments présents dans le sol, etc.
Les sols
Les sols contiennent une quantité importante du carbone qui, lors des procédés décrits précédemment, est stocké durant de longues périodes (sauf extraction par l’Homme et éruptions volcaniques). La quantité totale représente 2 à 3 fois ce qui est contenu dans l’atmosphère.
Mais comme nous l’avons vu sur le schéma des flux de carbone, les échanges naturels entre le monde du vivant, l’atmosphère, et les sols, sont minimes. Le flux le plus important étant notre consommation en énergie fossile.
Réduire la concentration de carbone dans l’atmosphère
Puisque le carbone est excédentaire dans l’atmosphère et qu’il provoque un effet de serre indésirable, la solution serait d’inverser les ordres de grandeur entre ce que l’on émet et ce que l’on capte. C’est-à-dire d’en récupérer d’avantage que l’on en envoie dans l’atmosphère.
La solution la plus efficace pour réduire la concentration de carbone dans l’atmosphère, est de limiter notre usage des énergies fossiles. Ce flux de carbone supplémentaire que nous avons créé déséquilibre le cycle global et conduit à un effet de serre croissant.
En parallèle de cette démarche de réduction, nos experts étudient les possibilités de réinjecter du carbone dans les 3 types de puits évoqués. Notons au préalable que les quantités en jeu ne compenseront pas les 7,8 GtC que nous puisons annuellement dans les sols.
Par ailleurs les énergies fossiles que sont le pétrole, le gaz et le charbon sont non renouvelables. Elles ont aujourd’hui une disponibilité décroissante et par conséquent un coût en hausse associé à des incertitudes d’approvisionnement.
Se départir au maximum de leur usage présente donc également un intérêt économique et stratégique.
Préserver les espèces
J’ai évoqué dans le chapitre précédent le mécanisme de la photosynthèse qui permet de stocker le carbone par les espèces végétales. Ce mécanisme est essentiel à notre survie (production d’oxygène) et essentiel au maintien de l’effet de serre à un niveau acceptable.
Pour que l’efficacité de ce procédé perdure, il nous faut protéger les espèces concernées. La solution pour cela est assez intuitive, il faut minimiser notre destruction des milieux végétaux.
Pour le cas des océans, le phytoplancton étant une espèce vivante il se comporte différemment suivant les conditions de vie auxquelles il est soumis.
Une hausse de l’acidité des océans par exemple est néfaste pour la survie de nombreuses espèces végétales qui les peuplent. Or cette acidification est en cours, due à l’absorption de notre excédent de CO2 par les plantes, aux écoulements azotés venant notamment des pratiques agricoles, ou encore des acides sulfuriques issus de la combustion de carburant par les navires.
Les domaines cités (agriculture, transport maritime) sont un exemple mais représentent l’effet cumulatif de nos pratiques.
En utilisant de l’énergie fossile pour augmenter notre puissance mécanique, nous produisons des gaz à effet de serre. Ces gaz sont absorbés par les océans ainsi que d’autres produits indésirables, et réduisent la capacité d’absorption du CO2 par le phytoplancton.
Pour ce qui concerne les milieux terrestres, le procédé de la déforestation est le plus évident lorsque l’on parle de protéger les végétaux. Supprimer tout un écosystème végétal, c’est se priver de sa capacité à stocker le CO2 et donc à minimiser l’effet de serre.
De la même façon que pour les océans, rejeter dans ces milieux végétaux les ‘déchets’ de nos pratiques industrielles ou agricoles, fragilise les espèces en mesure de nous aider à limiter le dérèglement climatique.
Un grand nombre de pratiques humaines peuvent entrainer une diminution de la capacité des plantes à absorber le CO2. Il ne s’agit pas ici d’en faire une liste mais d’attirer l’attention sur la réflexion que nous devons mener chaque fois que nous envisageons une activité.
Augmenter la capacité des puits de carbone
Puisque nous nous sommes penchés sur la façon de ne pas dégrader nos puits de carbone, voyons si nous pouvons en augmenter la capacité. Cela permettrait d’absorber plus de carbone et donc peut être d’inverser la balance en carbone qui pour l’heure est déficitaire.
En complément au chapitre précédent, il y a tout d’abord la reforestation. Ajouter des espèces végétales capables d’absorber le CO2, c’est augmenter la capacité globale de séquestration du carbone. Attention néanmoins, les végétaux sont des êtres vivants dont les interactions avec leur milieu et les autres espèces sont complexes et fragiles.
Il ne suffit donc pas de réaliser une plantation d’arbres pour obtenir une forêt. Une forêt est un écosystème composé d’une multitude d’espèces, avec des chaines alimentaires, des rythmes, des échanges, etc. C’est ce milieu naturel qui permet l’absorption massive du CO2.
Autrement dit raser une forêt vieille de plusieurs centaines d’années et réaliser une plantation d’arbres d’une seule espèce sur une parcelle équivalente, ne produit pas la même capacité de photosynthèse. Les espèces doivent survivre sur plusieurs années, se développer, le sol doit recevoir de la matière organique, pour que le processus fonctionne.
Pour les océans il n’est pas question bien entendu d’en augmenter la taille, ni d’injecter du phytoplancton. Une étude visait en revanche à ‘doper’ ce phytoplancton pour augmenter son potentiel d’absorption du CO2. Il s’agissait d’injecter du fer, élément vital au développement du phytoplancton.
Reste que la quantité de fer à injecter pour avoir un effet significatif sur la ‘pompe biologique’ dépasse la quantité présente sur Terre. L’idée en est donc restée à l’état de projet, mais trouver un moyen de ‘booster’ le phytoplancton serait effectivement bénéfique pour le climat.
Enfin concernant les sols, divers projets sont à l’état d’études notamment le projet ‘4 pour 1000’ lancé en 2015 par le ministère de l’agriculture. Il s’agit d’étudier pour les parcelles agricoles la capacité du sol à accueillir et retenir du carbone.
On pourrait alors réinjecter celui-ci dans le sol et le stocker. D’autres projets du même type sont en cours pour injecter du carbone dans les sols, les anciens puits de pétroles, ou encore les océans.
Pour l’heure aucun de ces projets n’a abouti à une technique permettant une réduction significative du carbone dans l’atmosphère. Par ailleurs aucune information ne suggère que cela se produira dans les années à venir.
Notre meilleure chance de réduire l’effet de serre est donc de limiter notre usage des énergies fossiles et de protéger nos écosystèmes capables d’absorber le carbone. Pour avoir une vue sur vos émissions de GES, la première étape c’est le Bilan Carbone.